Douzième tableau
Les loges avant la représentation d’Antony
Cussonnet et Harel sont déjà installés dans leur loge. Ils regardent la salle. Harel pousse Cussonnet dans la lumière.
HAREL. Mais montrez-vous.
CUSSONNET. Oh, regardez : Jules Janin du Figaro m’a fait un signe !
HAREL. Naturellement.
CUSSONNET. Et le directeur du Constitutionnel ! Il ne m’avait jamais salué.
HAREL. Naturellement.
CUSSONNET. Et Victor Hugo !
HAREL. Mais naturellement, mon ami. C’est la gloire. Vous êtes un auteur interdit.
Ils rendent des petits saluts affables aux personnalités du public, comme deux princes à leur balcon. Les bravos montent. Cussonnet se laisse gagner par le bonheur. La salle l’applaudit.
HAREL. Une grande route s’ouvre devant vous, mon cher Cussonnet : désormais, quoi que vous fassiez, bon ou mauvais, vous serez toujours l’objet de polémiques.
La salle fait maintenant une ovation debout à Cussonnet.
HAREL. Regardez ! Ils sont debout !
Cussonnet s’épanouit de plus en plus et envoie des baisers.
CUSSONNET. Monsieur Harel, je viens de comprendre une chose importante : jusqu’à hier, j’étais joué parce que j’avais du talent. Ce soir, je ne suis pas joué, donc j’ai du génie.
HAREL. Vous avez tout compris.